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Info Radio Péyi : Une nouvelle directive du procureur assoupli les procédures sur les délits routiers, recel et stupéfiants sur Cayenne, Rémire et Matoury

Alors que la polémique sur la suppression de poursuites pénales depuis le 1er juillet concernant les transporteurs de stupéfiants décidée en expérimentation par le procureur de la République Yves Le Clair, ce dernier a mis sur pied une nouvelle directive de politique pénale, qui vise elle aussi à alléger les dispositifs existants. Cela concerne les délits liés aux infractions concernant le code de la route, les stupéfiants et le recel sur les trois communes de Cayenne, Rémire-Montjoly et Matoury. Le procureur refuse de commenter mais explique que "ça ne supprimera pas les poursuites". En interne chez les forces de l'ordre, certains craignent, alors que les contrôles sont effectivement renforcés, que leurs efforts ne soient pas suivi d'effets. A 15 jours de la venue attendue du ministre de l'intérieur Gérald Darmanin, et alors que celle du garde des Sceaux est aussi envisagée, ce document embarrasse. Prévue jusqu'au 31 octobre, cette directive sera finalement discutée ce mercredi lors de la rencontre hebdomadaire de sécurité.

  • Par: samirmathieu
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Info Radio Péyi. Le procureur de la République de Cayenne, Yves Le Clair, a rédigé une nouvelle note de directive pénale, signée le 7 septembre dernier et entrée en vigueur le 9 septembre. Cette note, initialement prévue pour durer jusqu'au 31 octobre, sera finalement revue et discutée ce mercredi lors de la réunion hebdomadaire de sécurité. Elle ne concerne uniquement que les 3 communes de Cayenne, Matoury et Rémire-Montjoly. Elle est relative aux "conditions communes aux traitements des infractions à la législation sur les stupéfiants, à la police de la route et aux infractions de recel". Dans des cas bien précis et délimités dans le document envoyés aux forces de l'ordre, cette directive permet de supprimer des procédures qui ralentissent la chaîne pénale. Elle ne supprime pas les poursuites, mais a pour objectif de simplifier la chaîne, du contrôle aux éventuelles poursuites et condamnations, et donc de désengorger les audiences au tribunal, alors que le nombre de contrôles a été significativement augmentés depuis près d'un mois et encore plus depuis l'arrivée du 7e escadron de gendarmes mobiles il y a 10 jours. Sur la première semaine de présence effective du 7e escadron de gendarmes mobiles, du vendredi 9 au vendredi 16 septembre, 73 opérations de contrôles coordonnées ont été réalisées grâce. Au total, plus de 4 420 personnes ont été contrôlées. 3 111 véhicules ont été contrôlés et 768 scooters. Ces opérations ont entraîné 18 gardes à vue et 46 procédures pour des étrangers en situation irrégulière. 8 armes ont été saisies (dont 4 pistolets 9 mm et un fusil d'assaut avec des munitions de guerre), 2,3 kilos de cocaïne et 785 grammes de cannabis et 26 grammes d'or. 

 

Cette directive générale permet de donner des éléments pour automatiser certaines procédures sans que les officiers de polices judiciaires n'aient à appeler le parquet systématiquement. Mais elle va aussi dans le sens de la précédente directive qui a fait tant polémique la semaine passée, entrée en vigueur au 1er juillet dernier concernant les mules. Le document permet d'alléger la procédure, ce qui permettra le cas échéant, et lorsque le cadre juridique le permet, de baisser le nombre de garde à vue et de faire baisser le nombre de personnes convoquées en audience. Elle permet d'élargir une autre mesure, déjà initiée, celle de l'interdiction temporaire (6 mois) de tel ou tel quartier et ou commune.

POUR LES STUPEFIANTS 

Pour les stupéfiants, le texte signé du procureur de la République, Yves Le Clair, et auquel Radio Péyi a eu accès, évoque des situations où c'est l'OPJ (Officier de police judiciaire), qui est habilité pour, qui prend la décision ou non, de placer tel ou tel individu en garde à vue. Cela permet d'éviter des gardes à vue pour les plus petits porteurs de stupéfiants mais l'allègement de la procédure écarte les personnes ayant ingéré la drogue. Les mules seront poursuivies selon les dispositifs existants et plus contraignants. Pour la 1ere fois, la justice s'intéresse aussi aux petits porteurs et dealers de rue avec des mesures qui ont été détaillées dans d'autres documents du procureur à destination des services d'enquête.. 

POUR LES DELITS ROUTIERS

Pour les délits routiers, le procureur préconise des ordonnances pénales. Cela permet de procéder à des sanctions sans engorger les audiences. Ces ordonnances pénales pourront permettre d'éviter des gardes à vue uniquement pour les infractions liées à un taux d'alcoolémie jusqu'à 0,7mg/L d'air expiré, soit 1,4 grammes d'alcool par litre de sang. Il faut pour cela que l'ensemble des conditions soient remplies. Pour être très précis, c'est l'OPJ qui décide du placement en garde à vue ou pas là aussi. Si il y a recours à la force, là aussi l'OP est obligé de le faire. Mais sinon ça reste sa prérogative. Le procureur peut lui en revanche la lever ensuite, selon les éléments du dossier.  L'ordonnance pénale est une procédure simplifiée déjà largement utilisée en Guyane. Le prédécesseur d’Yves Le Clair, Samuel Finielz, l’avait largement démocratisée ces 3 dernières années et cette procédure est déjà utilisée dans de nombreuses juridictions. 

Les cas où l'allègement de la procédure est possible 

- circulation sans assurance (c'était déjà le cas avant où il n'y avait pas de garde à vue car cette infraction ne peut être punie d'une peine d'emprisonnement)

- conduite sans permis

- conduite avec permis ne correspondant pas à la catégorie

- conduite malgré une suspension administrative

- conduite malgré une annulation judiciaire de permis

- conduite sous l'empire d'un état alcoolique jusqu'à 0,8 grammes d'alcool par litre de sang (0,4 milligrammes par litre d'air expiré)

- conduite sous stupéfiants

- récidive de conduite sous stupéfiants

Attention, le fait de ne pas avoir de garde à vue dans ces cas précis, ne permettra pas à l'automobiliste le cas échéant de repartir avec sa voiture. Enfin, le fait d'être sous le coup d'ordonnance pénale n'empêche pas d'aller au tribunal où l'automobiliste n'ira pas en audience mais il se verra notifier sa sanction financière. Les amendes sont celles prévues par les textes et dans une ordonnance pénale, contrairement à une comparution classique, elle prend en compte également le fonds d'indemnisation.

RECEL DE VEHICULE A MOTEUR

Le dernier point de cette directive de politique pénale concerne le recel de bien provenant d'un délit puni d'une peine n'excédant pas 5 ans d'emprisonnement. Cela concerne le recel de vol de deux roues. Là aussi, sur les trois communes de Cayenne, Matoury et Rémire-Montjoly, l'OPJ pourra, si l'auteur du recel ne peut pas être identifié, de ne pas procéder à une garde à vue, ne pas appeler la permanence du parquet et donc classer sans suite. Le véhicule volé sera placé sous scellés, en vue de sa restitution à son propriétaire.

"PAS DE SUPPRESSIONS DE PEINE"

Yves Le Clair est particulièrement mutique dans cette affaire. Déjà, lorsque Radio Péyi vous avait informé le 26 juin dernier du précédent document qui fait aujourd'hui polémique, Yves Le Clair avait décliné nos invitations, ne voulant pas "révéler la nouvelle stratégie mise en place contre les trafiquants de drogue". Aujourd'hui, Yves Le Clair se refuse à commenter en interview, mais nous a quand même donné certains éléments. Yves Le Clair nous a indiqué qu'il ne s'agit pas de "suppressions de peine". Pour le procureur de la République de Cayenne, cette directive "doit surtout permettre de ne pas submerger la chaîne judiciaire lors des gros contrôles effectués". Pour les délits routiers, le procureur préconise des ordonnances pénales. Cela permet de procéder à des sanctions sans engorger les audiences, d'un tribunal en souffrance et qui voit arriver une pénurie de greffier, ce qui pourraient avoir des conséquences sérieuses dans les semaines à venir. 

LES RÉACTIONS CONTINUENT 

Pour l’instant pas ou peu de réactions sur cette nouvelle note, interne et uniquement destinée aux forces de l’ordre, hormis le policier syndicaliste Willy Ranguin et l’avocat maître José Lama ce vendredi matin dans Allo Péyi de Dominique Nugent sur Radio Péyi. Mais le monde politique continue de réagir et de se mobiliser sur le texte entrée en vigueur le 1er juillet sur les mules à l’aéroport, à l’instar de 3 des 4 parlementaires de Guyane… Les deux députés Jean-Victor Castor et Davy Rimane et le sénateur Georges Patient ont écrit un courrier commun mercredi au Garde des Sceaux Eric Dupont-Morett. L’ancien président de la CTG, leader du groupe d’opposition Rodolphe Alexandre a écrit à son successeur pour lui demander un débat ce mercredi lors de la prochaine séance plénière et demandé la rédaction d’une motion commune à tous les élus territoriaux de Guyane pour dénoncer l’ordonnance du procureur. Le président de la CTG Gabriel Serville explique que "nous ne pouvons nous satisfaire d’une telle décision qui ne constitue en rien une solution". Les deux groupes, de la majorité et d'opposition à la CTG, vont rediger une motion sur ce sujet et qui seront débattues mercredi matin à l'hôtel territorial pour arriver à la rédaction d'une seule et unique motion signée par l'ensemble des élus territoriaux.

La sénatrice Marie-Laure Phinéra-Horth avait dès sa prise de fonction, repris le travail déjà entamé par son prédécesseur Antoine Karam sur les mules. Ensemble, ils étaient hier les invités du Grand Forum de Gilles Vernet, sur Radio Péyi. 

Revoir l'émission Allo Péyi avec Dominique Nugent qui recevait vendredi Willy Ranguin, policier du syndicat Alliance à Cayenne et l'avocat maître José Lama, avocat au barreau de la Guyane :

Revoir le Grand Forum de jeudi, où Gilles Vernet recevait la sénatrice Marie-Laure Phinéra-Horth, l'ancien sénateur Antoine Karam et un membre d'une commission sur le trafic de drogues, Olivier Cigolotti :