Des étudiants étrangers protestent contre la hausse des frais d’inscription à l’université
La ministre chargée de l’Enseignement supérieur a annoncé une augmentation des frais d’inscription universitaire pour les étudiants hors Union Européenne.
L’université, une voie d’insertion
Une vingtaine d'étudiants a manifesté son mécontentement ce jeudi 13 décembre sur le campus Troubiran de l'Université de Cayenne. Ils protestaient contre la hausse des frais d'inscription, envisagée par le gouvernement, il s'agissait d'une manifestation organisée au niveau national. Le gouvernement a annoncé en novembre derniers que les frais d’inscription pour les étudiants étrangers passeront de 170 à 2 770 euros en licence, et de 243 à 3 770 euros en master à la rentrée 2019.
Auguste est étudiant ressortissant haïtien. Il voit cette augmentation comme une forme de rejet dans la société. « Cette augmentation est trop importante. Cette hausse est une façon de nous dire qu’on ne veut plus de nous à l’université », affirme-t-il. D’autres ne comprennent pas cette volonté d’éloigner les étudiants étrangers des universités car ils estiment être utiles à la nation française. « La France, la Guyane a besoin de nous. Nous voulons contribuer à l’évolution de ce pays. Si nous avons choisi le chemin de l’université c’est pour s’intégrer. L’autre voie c’est la délinquance », affirme Nelson étudiant en Langues étrangères appliquées à l’Université de Guyane.
Cette hausse des frais d'inscription n'est pas encore mise en œuvre, Frédérique Vidal, la ministre de l'Enseignement supérieur a annoncé que les étudiants déjà inscrits en cursus n'auraient pas à la payer.
La crainte de l’expulsion à tout moment
Plusieurs associations de défenses et d’accompagnement des étrangers (VIVA, RESF, UNEF) ont organisé une rencontre entre les étudiants d’origine étrangère à l’université de Guyane. Une centaine de ressortissants étrangers, principalement Haïtiens, ont trouvé un espace d’échange où ils ont témoigné de leur précarité administrative, de leur angoisse de se faire expulser. « Psychologiquement nous ne sommes pas bien », déclare un étudiant dans l’amphi de l’Université de Guyane. Ils affirment que régulièrement des policiers de la Police aux frontières (PAF) font des rondes autour de l’université. Les étudiants témoignent d’une situation de stresse permanent. Plusieurs d’entre eux ont déjà vécu la détention au Centre de rétention administrative. Ils dénoncent les brutalités subies lors des interpellations.
Réunion à l'Université de Guyane des étudiants pour discuter des leurs difficultés (Photo : A.BeharyLS)
Quelques professeurs soutiennent les étudiants étrangers en situation irrégulière en tenant des permanences pour leur fournir une aide dans leurs démarches. Selon Milo Oxygène, professeur d’anglais et membre de l’association Viva, les étudiants ont besoin de se rencontrer pour s’organiser. « Nous accompagnons les jeunes mais ne nous pouvons pas tout faire. Nous sommes dépassés par la situation. Il est important que les étudiants s’organisent, protestent pour rappeler qu’ils sont ici pour étudier », déclare-t-il.
Gabriel Serville à l’écoute des étudiants en situation irrégulière
Le député de Guyane a pu entendre les propos des étudiants. Il n’est pas resté insensible aux difficultés qu’ils rencontrent. « Comme toutes les composantes de notre société, j’ai entendu la peur qui anime nombre d’entre eux mais je retiens surtout leur détermination à s’intégrer dans le tissu guyanais » précise-t-il. Il annonce qu’un moratoire pourrait être envisagé pour distinguer ces étudiants des autres étrangers en situation irrégulière. « Dans un premier temps avec le consulat et le Préfet, on pourrait décliner ce qui ressemblerait à un moratoire afin qu’on lève le pied vis-à-vis de ces étudiants qui ne créent pas de troubles sur l’ordre public ». Gabriel Serville souhaite aller plus loin en trouvant un cadre règlementaire ou législatif qui permettrait de faciliter leur présence dans l’université et éviter qu’ils soient enfermés dans une peur morale.