UNOC 2025 : la Guyane en première ligne contre la pêche illégale et pour une gestion durable des ressources marines

Organisée dix ans après la signature de l’Accord de Paris, la conférence UNOC 2025 réunira à Nice des milliers de chefs d’État, de scientifiques, de membres de la société civile et d’acteurs économiques pour construire un avenir durable pour l’océan.
Un pavillon spécifique consacré aux territoires d’Outre-mer accueillera les représentants de la Guyane, dont Jean-Paul Ferreira, premier vice-président de la CTG, et le WWF Guyane. Ensemble, ils envisagent de défendre une gestion plus stricte et plus juste des ressources marines, avec une priorité : la lutte contre la pêche illégale.
Le TED, un exemple guyanais à défendre à l’échelle européenne
Parmi les messages forts portés à Nice, le soutien au dispositif TED (Turtle Excluder Device) figure en tête. Ce système de grille permet de réduire les captures accidentelles — notamment de tortues marines — lors de la pêche aux crevettes a fait ses preuves au large de la Guyane, explique Laurent Kelle, responsable de l’antenne locale du WWF.
« En Guyane, c’est devenu obligatoire à la demande des pêcheurs. Il se trouve que ce n’est toujours pas le cas au niveau des normes d’importation de la crevette sauvage en Europe »
Le TED est une grille rigide placée à l’intérieur du filet de chalut, près de l’extrémité où les captures sont collectées. Cette grille est positionnée en biais et munie d’une ouverture de fuite.
- Les petites espèces, comme les crevettes, passent à travers la grille et finissent dans le sac à crevettes.
- Les espèces plus grandes, comme les tortues, sont bloquées par la grille et dirigées vers l’ouverture latérale, qui leur permet de s’échapper vivantes.
Le WWF Guyane dénonce une contradiction européenne : la Guyane respecte des critères écologiques stricts, mais l’UE continue d’importer des crevettes provenant de zones où aucun système de sélectivité n’est imposé :
« Pour un kilo de crevettes pêchées, ce sont 9 kilos d’autres espèces — poissons, tortues, requins — qui sont capturés et rejetés. C’est un désastre écologique qu’on peut éviter. »
L’Union européenne interpellée sur ses critères d’importation
Le WWF Guyane plaide pour l’instauration de normes environnementales strictes pour les produits de la mer importés dansl’Union européenne. Un enjeu que la délégation entend porter haut et fort, indique Laurent Kelle :
« L’Union européenne doit interdire l’importation de crevettes qui ne sont pas pêchées avec un TED. Ce sujet, nous le défendrons avec la force du réseau WWF et de tous nos partenaires »
Il regrette que certaines directions de la Commission européenne, en particulier la DG Trade, continuent de privilégier la libre concurrence au détriment de la protection de la biodiversité.
Une urgence documentée : 103 bateaux illégaux recensés
Au-delà des questions de normes, l’ONG alerte sur l’intensification alarmante de la pêche illégale au large des côtes de Guyane. Un survol mené début juin a permis de recenser 103 navires illégaux en provenance du Brésil et du Suriname principalement. « On a égalé un record d’intensité. Ce fléau est massif, et la Guyane est en première ligne », déplore Laurent Kelle.
© Marine Nationale
Pour renforcer la coopération régionale, un nouveau projet baptisé “Great Ocean” sera lancé avec le soutien de l’AFD. Il impliquera les sociétés civiles de la Guyane, du Guyana et du Suriname. Laurent Kelle explique le principe du projet :
« L’idée est de créer un réseau d’observateurs de la pêche illégale et de mobiliser des jeunes ambassadeurs de la biodiversité marine. La Guyane ne peut pas être seule dans ce combat »
L’initiative vise à mieux documenter le phénomène dans les pays voisins, encore peu médiatisés sur ce sujet, afin de responsabiliser l’ensemble des gouvernements concernés.
Une déclaration politique attendue, mais sous surveillance
À l’issue de la conférence, un plan d’action global devrait être adopté, incluant une déclaration politique et une série d’engagements volontaires. Mais la vigilance reste de mise prévient l’ONG :
« La conférence de Lisbonne en 2022 n’a rien produit de concret. Cette fois, avec la France et le Costa Rica aux manettes, on espère autre chose. Mais ce sont les faits, pas les discours, qui feront la différence ».
Juin, le mois de la mer pour la Guyane
Dans le cadre de l’Année de la mer 2025, la Guyane sera particulièrement mise à l’honneur durant tout le mois de juin. Une multitude d’événements portés par des associations, collectivités, institutions et citoyens permettront de découvrir les richesses du littoral et de renforcer la conscience écologique autour des enjeux maritimes.