Ariane 5 tire sa révérence… Et cette fois, c'était la bonne
Mercredi soir, le dernier tir d'Ariane 5 s'est déroulé sans encombre sous les yeux de centaines de spectateurs réunis sur place, parmi lesquels des officiels locaux ou encore l'ancienne ministre française de la Justice, Christiane Taubira. Certains collaborateurs ont laissé éclater leur joie après le décollage réussi, tandis que des applaudissements ont salué la deuxième séparation. La mise en orbite du satellite français « marque un tournant majeur pour nos armées : meilleures performances et meilleure résistance aux brouillages », s'est félicité sur Twitter le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu.
Lancement depuis la plage de la cocoteraie à Kourou (Photo : Centre spatial guyanais)
Le port spatial européen de Kourou en Guyane a donc dit adieu à Ariane 5, qui en 27 ans de carrière, aura mis 239 satellites en orbite. Une soirée avec une pointe d'émotion pour Karine Leveau, directrice du transport spatial au CNES :
« Ariane 5 est le lanceur qui m’a donné l’envie de travailler dans le spatial, au CNES, à la direction des lanceurs. Ce lanceur est un symbole pour nous. Il nous a permis de faire de magnifiques missions. La dernière que tout le monde à en tête est le télescope James Webb lancé le 25 décembre 2021. Elle nous a permis de faire des choses magnifiques et nous a donné beaucoup d'émotions, de bonheur et parfois des déceptions. Mais toujours cette puissance, cet engouement autour de la réalisation des vols. Cette mini-pression car chaque vol est différent, chaque client ses spécificités. Les missions s'enchaînent mais ne se ressemblent pas ! ».
Un enfant dit au revoir à la fusée sur la plage (Photo : Radio Péyi)
Des au revoir sous le regard des Guyanais car régulièrement le CNES organise des animations grand public à Kourou et à Cayenne avec une projection sur grand écran et des animations pour les plus petits sur les plages. L’émotion était aussi au rdv depuis la plage de Buzaré à Cayenne où près de 300 personnes sont venues dire « au revoir » à la dernière Ariane 5 sur un succès total à l'occasion de son 117ème vol. Lorraine se souvient des lancements durant son plus jeune âge :
« A l’époque on entendait des bruits comme une explosion. J’ai l’impression que ce bruit est moins fort de nos jours. Il y a peut-être eu des améliorations. Je la voyais passer dans mon jardin dans ma cour quand j’étais petite. Et la j’avoue que je veux donner cette envie à mon fils pour susciter des rêves dans ce domaine »
Elle espère que la prochaine Ariane 6 contribuera au développement de la télécommunication au niveau local :
« Pour la suite, je pense qu’il y aura un engouement. On envoie des fusées tout de même et malgré tout nous n’avons pas de connexion, de réseaux à la hauteur. Et peut-être qu’il y aura encore plus d’engouement si on arrive à la Guyane à ce niveau-là »
Rudiger Albat Responsable du programme Ariane 5 pour l'ESA, il prendra sa retraite tout comme la fusée peu après le dernier lancement. Il a commencé sa carrière au début d’Ariane :
« J’ai commencé en 1985 avec des lancements d'Ariane 1. J'ai eu l’opportunité de voir les derniers lancements d'Ariane 1, 2, 3, le premier d'Ariane 4, le premier d'Ariane 5. Je me sens comme pour chaque lancement, ce n'est jamais la routine. Je ne pense pas trop au fait que c'est le dernier de l'Ariane 5 »
Et Thierry Valley est sous-directeur chargé de la protection et de la sauvegarde de l’environnement au CNES, arrivé au début de l’histoire d’Ariane 5 en 1995. Sur les 117 lancements, il a accompagné 100 lancements à différents postes :
« Une émotion que je retrouve car j'ai eu l'immense privilège en 2003 de faire le dernier lancement d'Ariane 4, je retrouve la même ambiance mélangée de nostalgie, de fierté, d'émotions et de volonté de faire beaucoup et encore pour que la dernière soit vraiment parfaite ».
La suite : Ariane 6 doit prendre la relève
Aucune date précise n'est annoncée pour le vol inaugural mais le carnet de commandes comporte déjà 28 contrats signés.
Ariane 6 assemblée au port spatial européen à Kourou (photo : CNES)
Ce vol d'adieu d'Ariane 5 sera suivi de longs mois de vide en attendant la future Ariane 6 (au mieux fin 2023) dont le déploiement pâtit de retards cumulés. Plus puissante et plus compétitive avec des coûts divisés par deux par rapport à Ariane 5, Ariane 6 a été conçue pour résister à la société américaine SpaceX d'Elon Musk, qui réalise plus d'un tir par semaine.