Des consultations du personnel des hôpitaux de Guyane en vue du CHU pour le 1er janvier 2025
L’ Agence Grand Public, sollicité par l'ARS Guyane et le Groupe hospitalier de territoires, a mené une série de neuf rencontres sur l’ensemble du territoire, dans les centres hospitaliers de Cayenne, Kourou et Saint-Laurent du Maroni ainsi que dans les hôpitaux de proximité. Les aspirations, les interrogations et les craintes du personnel hospitalier.
450 salariés se sont exprimés librement sur leurs aspirations et leurs craintes. Parmi eux, Pascal Lecante. Il est infirmier au CHC. Il craint l’effet d’annonce mais nourrit tout de même des espoirs en ce futur CHU :
« C’est une démarche pleine de bonnes intentions, de sincérité, de franchise. Mon intervention portait sur le fait qu'on sache le contenu des enveloppes et à quoi ces enveloppes vont servir concrètement dans le financement du CHU. Mes craintes portent sur la constance du développement du projet, la constance dans l'investissement de tous les protagonistes. J'aimerais que cette annonce ne soit pas un épiphénomène, qu'on sente qu'on se développe et qu'on monte en puissance »
© Radio Péyi - Décembre 2024
Céline Félicité est infirmière puéricultrice depuis près de 9 ans au CHC. Pour elle ces moments d’écoute et d’échanges étaient essentiels :
« Je travaille depuis 9 ans environ et c'est la première fois qu'il y a une rencontre de ce genre qui se fait. C'est un temps très fort de pouvoir enfin se rencontrer entre la direction et de pouvoir échanger, communiquer, écouter, s'écouter les uns les autres pour pouvoir justement parler de ce beau projet. »
Si certains voient dans ce projet une opportunité unique, d'autres expriment leurs inquiétudes face à l’ampleur des changements à venir comme Carole Gaillou, technicienne information médicale au centre hospitalier de Kourou :
« Ça va être une belle usine à gaz quand on sera au CHU parce qu'il va falloir qu'on travaille sur plusieurs logiciels, sur plusieurs entités juridiques et donc là, jusqu'à maintenant, on n'est pas prêt. »
Malgré ces doutes, le CHU suscite aussi de grands espoirs, notamment chez Jean-Yves Cattin médecin-chef de l’hôpital de proximité de Saint-Georges de l’Oyapock. Pour lui, c’est peut-être une chance de fidéliser les équipes médicales formées au niveau local :
« Les nouveaux cursus universitaires, c'est la possibilité d'avoir des soignants qui sont formés ici en Guyane. Et ça, pour nous, c'est important parce qu'on a souvent du mal à former nos équipes puis on a du mal à les fidéliser. On espère que si on a des soignants formés en Guyane, ils resteront un peu plus chez nous. »
Le personnel des sites isolés espèrent que ce CHU limetera le turn over de ce qu'ils appellent les "sac à dos". Ce personnel de santé venu de l'Hexagone qui bénéficie d'avantages pour leur installation mais qui ne reste pas suffisamment longtemps.
Une autre question cruciale soulevée par le personnel concerne la répartition équitable des moyens et des décisions afin que les ressources ne soient pas centralisées uniquement à Cayenne. « Il ne faut pas que ce CHU soit Cayenno-centré », insiste un agent du CHOG lors de sa prise de parole. Christophe Bouriat, le directeur du Centre hospitalier de Cayenne rassure sur ce point :
« C'est exactement le contraire de ce qu'on veut. C’est un CHU multisites. Les trois sites hospitaliers seront universitaires. La réponse aux besoins de santé de la population ne va pas se faire uniquement sur un site, uniquement à Cayenne, mais aussi au CHOG et à Kourou. Il doit se faire dans le cadre de filières territorialisées sur les trois établissements et allant jusqu'aux CDPS et hôpitaux de proximités »
© Institut Santé des Population d'Amazonie / Radio Péyi - Décembre 2024
Enfin, pour clore le débat, Pascale Lecante, infirmier au CHC rappelle les origines lointaines de ce projet qui est aussi le fruit des revendications portées par le mouvement social de 2017 :
« D’où vient l’idée du CHU avant tout ? Ce n'est pas que quelques directeurs ou quelques médecins qui, d’un coup, ont eu cette idée. Cela vient de la population. C'était le mouvement social en 2017. Et quand la population disait CHU, ils avaient des étoiles dans les yeux. Ce qu'ils voulaient, c'était de l'excellence. Maintenant, c'est notre responsabilité de leur offrir cela. Plutôt que de craindre ce projet, il faut que nous soyons unis et que nous travaillions ensemble. »
Ce qui met finalement tout le monde d’accord pour la réussite du CHU c’est la capacité à rassembler les compétences de tous et à répondre aux attentes des patients Guyanais. Si le 1er janvier 2025, s'ouvrira sur une nouvelle ère pour la santé publique en Guyane, il s’agit avant tout d’une première étape administrative.